Brève
Le CO2 atmosphérique lié à la ventilation des eaux océaniques ?
La ventilation des eaux océaniques profondes, riches en carbone, peut fortement affecter le CO2 atmosphérique, mais son histoire à l’échelle millénaire est mal connue.
Les mesures des paléo-concentration de CO2 atmosphérique effectuées dans les bulles d’air des carottes de glaces polaires présentent – pour les stades froids (stadials) de l’Atlantique Nord , de durée millénaire – des tendances contrastées énigmatiques (hausses, baisses ou stabilité). Cet article présente un enregistrement – à haute résolution et bien daté sur les derniers 150 000 ans – des variations de l’acidité des eaux profondes de l’Atlantique Nord. Il révèle pour les stades froids, cinq modes de ventilation océanique et leurs conséquences pour le stockage du carbone par l’océan et pour les variations de concentration en CO2 atmosphérique.
Nos données (ratio Bore/Calcium, proxy de l’ion carbonate (CO3(2-)) mesuré sur une espèce de foraminifère benthique, au long d’une carotte sédimentaire de la marge ibérique) démontrent que lors des stades associés à une forte augmentation du CO2 atmosphérique, l’océan Austral fortement ventilé a libéré de fortes quantités de carbone issu de ses eaux profondes. D’autres stades froids ont été caractérisés par une faible ventilation des océans austral et atlantique nord, ce qui favorisait l’accumulation de carbone dans l’océan profond, ralentissant le transfert de CO2 à l’atmosphère, ou l’inversant, avec pour conséquence une baisse du CO2 atmosphérique.
Cet article démontre qu’à l’échelle millénaire le stockage de carbone par l’océan et la teneur en CO2 atmosphérique sont modulés par plusieurs modes de ventilation océanique résultant de l’interaction des deux régions polaires, et non pas du seul océan austral.
J. Yu, R. F. Anderson, Z. D. Jin, X. Ji, D. J. R. Thornalley, L. Wu, N. Thouveny, Y. Cai, L. Tan, F. Zhang, L. Menviel, J. Tian, X. Xie, E. J. Rohling & J. F. McManus.
Photos © Archives IPEV (Institut polaire Paul-Emile VICTOR)
Une éruption solaire extrême il y a 14300 ans
Les cosmonucléides tels que le carbone-14 (14C) et le béryllium-10 (10Be) sont produits dans la haute atmosphère par le rayonnement cosmique galactique qui est modulé par l’activité du Soleil. Notre étoile peut aussi émettre des particules suffisamment énergétiques pour produire ces isotopes lors d’éruptions solaires extrêmes. Les cosmonucléides sont les meilleurs indicateurs pour reconstituer l’activité solaire avant la période des mesures instrumentales.
Menée par des équipes du CNRS (voir encadré), une nouvelle étude a permis de bâtir des séries dendrochronologiques1 couvrant les 15000 dernières années à partir d’arbres subfossiles découverts le long des rivières de la région de Gap dans les Alpes françaises. En parallèle ils ont mesuré la teneur en 14C des cernes annuels de croissance de ces arbres grâce au spectromètre AixMICADAS2.
Les équipes de recherche ont alors découvert un pic de 14C remarquable qui a eu lieu au sein d’une seule année, entre 14300 et 14299 ans avant le présent (i.e. 1950). En comparant ces résultats avec les enregistrements de 10Be dans les glaces du Groenland grâce à la modélisation du cycle du carbone et à une analyse statistique sophistiquée, les chercheurs ont pu attribuer cette anomalie à une éruption solaire d’une ampleur exceptionnelle, la plus importante jamais enregistrée.
Un tel évènement serait aujourd’hui catastrophique pour notre société moderne, causant d’énormes dégâts aux réseaux électriques et de télécommunication, ainsi qu’aux systèmes de satellites.
Source : https://www.insu.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/une-eruption-solaire-extreme-il-y-14300-ans
Première lumière pour Hirise, nouvel instrument d’étude des exoplanètes
C’est une nouvelle corde à ajouter à l’arc du Very Large Telescope (VLT) de l’Observatoire européen austral (ESO). Plus exactement, le VLT vient d’être enrichi d’un nouvel instrument au concept novateur permettant de combiner la puissance de deux de ses cordes déjà installée. Ce nouveau venu appelé Hirise couplera l’imageur d’exoplanètes Sphere et le spectrographe à très haute résolution Crires+. Le premier a une très bonne résolution pour l’imagerie directe des exoplanètes, mais le second est 2000 fois plus puissant pour séparer et analyser la lumière émise par ces planètes, ce qui permet de remonter à la composition de leur atmosphère. Ainsi, en associant ces deux instruments grâce à des fibres optiques, Hirise permettra d’approfondir l’étude de planètes déjà connues. Il a collecté avec succès sa première lumière depuis le VLT dans le désert d’Atacama au Chili le 9 juillet 2023.
Hirise a bénéficié d’une subvention ERC Starting et a été développé au sein du Laboratoire d’astrophysique de Marseille (CNRS/CNES/Aix-Marseille Université). Il a aussi profité de l’expertise des équipes de l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (CNRS/Université Grenoble Alpes), du Laboratoire Lagrange (CNRS/Observatoire de la Côte d’Azur/Université Côte d’Azur).
Retrouvez toutes les photos d’Hirise sur CNRS Images.
Source CNRS : https://www.cnrs.fr/fr/premiere-lumiere-pour-hirise-nouvel-instrument-detude-des-exoplanetes
Le MedECC va recevoir le Prix Nord-Sud du Conseil de l’Europe
Le Prix Nord-Sud du Conseil de l’Europe 2020 sera remis, le 9 décembre, au Réseau d’experts méditerranéens sur le changement climatique et environnemental (MedECC) pour l’élaboration de la toute première évaluation scientifique sur l’impact du changement climatique et environnemental sur le bassin méditerranéen. Le MedECC est composé de plus de six cents scientifiques de 35 états de la Méditerranée et d’Europe engagés dans la recherche et la planification de politiques environnementales.
Le prix Nord-Sud est attribué tous les ans depuis 1995 à deux candidats (activistes, personnalités ou organisations) s’étant distingués par leur engagement exceptionnel pour promouvoir la solidarité entre le Nord et le Sud.
Les variations orbitales comme forçage majeur du climat Éocène-Oligocène
Des études récentes évoquent la forte sensibilité du climat de la transition Éocène-Oligocène, aussi appelée « Grande Coupure », aux variations orbitales terrestres. À cette époque, il y a environ 34 millions d’années, le CO2 atmosphérique diminue, la température de la Terre baisse, la calotte de glace antarctique se forme et de nombreuses espèces végétales et animales disparaissent. Cependant, les indicateurs paléo-environnementaux continentaux (sédiments et fossiles qu’ils contiennent) sont généralement datés avec trop peu de précision pour rendre compte de ce phénomène. Les compilations de ces indicateurs – des catalogues recensant les fossiles datés d’une même période – sont supposées représenter le climat « moyen » de la période considérée, tout en rassemblant des plantes ayant vécu dans des conditions potentiellement très différentes. Par ailleurs, les modèles de climat étant complexes, ils sont coûteux en temps de calcul. C’est pourquoi ils utilisent généralement des simulations paléoclimatiques qui ont des paramètres orbitaux actuels et négligent donc la variabilité orbitale.
Cette étude a cherché à évaluer à quel point l’absence de prise en compte des variations orbitales par les modèles et les compilations botaniques biaise la représentation des paléoclimats de cette époque. À l’aide du modèle de système-terre français IPSL-CM5A2 récemment optimisé pour l’étude des paléoclimats, et du modèle de surface continentale ORCHIDEE, les chercheurs ont réalisé un large panel de simulations testant différentes configurations orbitales. Ces simulations permettent d’améliorer nettement la correspondance aux données botaniques disponibles et de proposer une cartographie globale de la sensibilité de la végétation au forçage orbital pour l’Éocène et l’Oligocène.
Les résultats montrent que l’impact conjugué de la baisse de CO2 et des variations de l’obliquité (qui caractérise l’inclinaison de l’axe de rotation de la Terre) induit une fragmentation des corridors bioclimatiques en Anatolie et en Sibérie. Les implications biogéographiques de ces résultats sont importantes, car ces couloirs migratoires reliant l’Europe à l’Asie ont étés déterminants dans la migration des faunes asiatiques vers l’Europe de l’Ouest lors de la Grande Coupure. L’étude montre également que la végétation des tropiques, à CO2 constant, aurait pu osciller entre des conditions de forêt tropicale humide et de forêt arbustive ouverte, voire de désert. Ces changements environnementaux majeurs sont liés à l’impact de la précession (le changement graduel d’orientation de l’axe de rotation de la Terre), et dans une moindre mesure de l’obliquité, sur les gradients de température intertropicaux, permettant la mise en place intermittente d’un climat de type mousson. Cela confirme les études récente postulant l’existence d’une mousson périodique en Chine de l’Est, et permet d’étendre la question à l’ensemble des tropiques.